Gwénaël FROGER
Juriste
Gwénaël Froger : La validation des acquis de l’expérience, plus généralement connue sous l’acronyme « VAE », permet d’obtenir un diplôme grâce à la promotion de son expérience salariée, bénévole, ou élective, sans pour autant justifier d’une formation académique.
Il s’agit de la troisième voie diplômante, après la formation initiale et la formation continue.
Concrètement, le candidat passe un examen oral qui a lieu devant un jury. L’idée est de prouver qu’il possède toutes les aptitudes, les connaissances et les compétences requises par le diplôme qu’il espère obtenir.
Il peut s’agir, par exemple, d’obtenir un master en droit social pour le candidat qui, de niveau licence, exerce depuis plusieurs années au sein d’un cabinet d’avocats, au poste de juriste spécialisé en droit du travail.
Gwénaël Froger : La loi Marché du travail en vue du plein emploi porte bien son nom dans la mesure où, pour répondre aux besoins du marché, le législateur entend permettre aux citoyens les moins qualifiés d’accéder à des emplois qu’il leur est difficile d’atteindre sans diplôme.
Bien que la VAE existe depuis 2002, cette voie est peu empruntée, parce qu’elle est d’abord très sélective puis, relativement complexe.
Dans un rapport remis au Gouvernement en 2020, on constate que la VAE est source d’échec plus que de valorisation. Par exemple, en 2018, sur 62 619 candidats, seulement 23 971 ont obtenu un diplôme. Un delta important qui s’explique par un manque d’accompagnement des candidats, ainsi que par des frais trop coûteux pour un résultat incertain.
Le législateur souhaite donc rendre la VAE plus attractive : à cet effet, il élargit son accessibilité, optimise l’accompagnement des candidats et leur accorde une plus vaste « récompense » en fin de parcours.
Gwénaël Froger : Lorsqu’un candidat souhaite s’engager dans un processus de VAE, il doit compter 6 à 12 mois pour :
Gwénaël Froger : Jusqu’à récemment, l’article L335-5 du Code de l’éducation réservait la VAE aux personnes engagées dans la vie active justifiant d’une activité professionnelle ou bénévole, ou inscrite sur la liste des sportifs de haut niveau, ou ayant exercé un mandat syndical ou de représentation locale.
Le décryptage des bénéficiaires était donc fastidieux et, en pratique, relativement limité.
En outre, il fallait justifier d’une année d’expérience professionnelle au moins pour prétendre à la VAE.
Les nouvelles dispositions du Code du travail telles que résultant de la loi marché du travail ouvrent le dispositif de la VAE à quiconque le souhaite : les expériences prises en compte ne sont plus listées de manière exhaustive. Elles sont simplement définies comme « des activités en rapport direct avec le contenu de la certification visée ».
La loi précise d’ailleurs que les stages réalisés dans le cadre d’un parcours de formation ou d’aide à l’insertion peuvent servir à valoriser son savoir-faire.
En outre, il n’existe plus aucune exigence de durée minimale d’activité.
Gwénaël Froger : La nouvelle lettre de l’article L.6313-5 du Code du travail marque un tournant majeur puisqu’il est désormais possible de ne solliciter que la validation d’un bloc de compétences issu d’une certification enregistrée dans le répertoire national des certifications professionnelles. On parlera de « VAE partielle ». Vous l’aurez compris, il n’est plus nécessaire de solliciter la validation du diplôme dans son intégralité, le candidat peut donc prétendre à la validation de quelques matières « seulement ».
Ce choix a été fait par le législateur pour contrer le caractère décourageant de la VAE lorsqu’un candidat n’a pas la chance de pouvoir cocher toutes les cases requises pour l’obtention du diplôme. Ainsi, quelle que soit la validation obtenue, elle est vectrice de réussite et de progression !
Gwénaël Froger : Oui, tout salarié peut bénéficier de la VAE et a le droit à une absence normalement rémunérée de 48 heures (contre 24 heures avant la loi) par session d’évaluation. Notez que cette durée peut être augmentée par convention ou accord collectif.
Néanmoins, le salarié devra demander une autorisation d’absence à son employeur. La loi ne modifie pas la procédure dans ce cas. Une fois la demande déposée, l’employeur doit y répondre, par écrit, dans un délai de 30 jours calendaires suivant sa réception.
Notez qu’il peut donner son accord ou reporter l’autorisation d’absence pour des raisons de service. Ce report ne pourra néanmoins pas excéder 6 mois à compter de la demande.
Attention, l’absence de réponse de l’employeur dans ce délai vaut accord.
Gwénaël Froger : La VAE est vivement critiquée en raison des insuffisances dans l’accompagnement du candidat notamment pour préparer sa recevabilité, étape cruciale et jugée difficile.
Désormais, un candidat à la VAE sera accompagné du début à la fin et ce, de plusieurs façons. Il pourra bénéficier :
Gwénaël Froger : Dans son rapport faisant suite à la lecture du projet de la loi Marché du travail, le Sénat indique que le coût moyen d’une VAE est d’environ 1 500 €, mais que les tarifs varient selon le profil des candidats et peuvent aller jusqu’à 5 000 €.
Aujourd’hui, la VAE peut être financée par la Région, pôle emploi, l’AGEFIPH, ou via son compte personnel de formation (CPF). Le financement comprend notamment :
Une prise en charge de ces frais avait été exceptionnellement mise en place lors de l’épidémie de Covid-19 par les commissions paritaires interprofessionnelles dénommées associations de « Transitions Pro » (ATPro).
La loi vient pérenniser cette dernière prise en charge des frais afférents à une procédure de VAE, à condition qu’elles retiennent le caractère réel et sérieux du projet du candidat.
Les modalités de prise en charge ne sont pas encore arrêtées, un décret est attendu pour étayer cette mesure.
Gwénaël Froger : Effectivement, la loi prévoit de mettre en place une expérimentation pour les contrats de professionnalisation qui pourront comporter des actions en vue de la VAE.
La durée de l’expérimentation est prévue pour 3 ans à compter d’une date fixée par décret, et au plus tard le 1er mars 2023. Néanmoins, des précisions sont vivement attendues pour la mise en œuvre de ce dispositif.
*Loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022 portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (article 10 et 11)
Les informations indiquées dans cet article sont valables à la date de diffusion de celui-ci.